La transformation digitale est bien plus qu’un simple buzzword. C’est une nécessité pour les entreprises plongées dans un environnement toujours plus concurrentiel, un levier de performance pour tutoyer l’agilité des pure players. Les bonnes pratiques de Ludovic Leraistre, consultant en transformation digitale chez Salesforce, pour faire de votre entreprise un cheval de course numérique.

Réfléchir avant d’agir : trouver son why

La transformation digitale est nécessaire à la survie d’une entreprise, tant ses clients sont habitués à utiliser la technologie au quotidien. Bien que les entreprises soient conscientes de cette nécessité, « 70 % des projets de transformation digitale échouent », déplore Ludovic Leraistre. Outre un défaut d’organisation du projet, une raison récurrente de cet échec est de ne pas avoir su donner du sens à l’activité de l’entreprise, la privant de facto de son potentiel de disruption. Clarifier sa raison d’être donne non seulement un horizon au projet mais aussi un ensemble de valeurs auxquelles se référer. Au sein de l’entreprise, l’engagement des collaborateurs sera d’autant plus élevé que leur action aura du sens pour eux.

« Pour déterminer la finalité de votre transformation, vous devez d’abord connaître la finalité de votre entreprise, autrement dit, ce que l’expérience client que vous proposez a de plus que celle de vos concurrents », ajoute Ludovic Leraistre. Cette introspection est difficile pour une entreprise créée de longue date, souvent prisonnière de son héritage culturel, d’une mission originelle qui a évolué au fil des années.

Un champion de ce repositionnement est Netflix. Du service de location de DVD par abonnement mensuel créé en 1999 à la plateforme révolutionnaire de vidéo à la demande dévoilée en 2007, en passant par la production de séries et de films exclusifs, le géant du divertissement a su capitaliser sur la technologie pour transformer son business model. Entre 2008 et 2018, son chiffre d’affaires a bondi de 1,36 milliard à 15,8 milliards de dollars. À l’inverse, Kodak, qui avait pourtant développé la technologie de photographie numérique avant ses concurrents, a choisi de ne pas la commercialiser pour ne pas cannibaliser les ventes de pellicules argentiques dont elle était le leader. Ses concurrents ont proposé à leur tour des appareils numériques, basés sur les brevets de Kodak, et ce fut un succès. Kodak, lui, a fait faillite en 2012.

Alors, comment déterminer sa finalité ? La première clé est de penser le produit non pas comme une fin mais un moyen de servir l’expérience client. Pour y parvenir, l’entreprise aux prémices de sa transformation digitale doit affirmer ses convictions, ce en quoi elle croit pour ses utilisateurs. Par exemple, plutôt que d’étaler les caractéristiques de ses produits dans ses campagnes publicitaires, Apple fait le choix de mettre en exergue le but qu’il poursuit : « Nous croyons qu’un appareil technologique doit être aussi beau que fonctionnel », affirmait Jonathan Ive, ancien responsable du design chez Apple. La firme à la pomme entend ainsi rappeler à ses clients qu’elle partage les mêmes valeurs qu’eux.

La seconde clé est de prendre en compte les « mega-trends ». Les organisations doivent relever des macro-défis qui bouleversent la concurrence mondiale. La plus tristement actuelle est la crise climatique. Les clients consomment de plus en plus en fonction de leurs convictions citoyennes et sont donc sensibles aux actions durables des entreprises. E.Leclerc avait d’ailleurs anticipé cette demande citoyenne en ne distribuant plus de sacs plastiques en magasin… depuis 1996.

Il n’est de valeur que d’hommes

La transformation digitale doit être nécessairement précédée d’une réforme du management. Une des attentes principales des talents (comprendre collaborateur compétent et impliqué) est de travailler dans une organisation plate, avec moins de pression hiérarchique. Libérés, responsabilisés et reconnus, ils iront au-delà de leur zone de confort pour davantage d'innovation et d'efficacité dans l'exécution. La communication est plus directe, les équipes plus synchrones et les objectifs stratégiques plus rapidement atteints.

Les collaborateurs ne sont pas les seuls acteurs du changement. Les clients attendent des produits personnalisés. Citroën propose ainsi 36 combinaisons de couleurs de carrosserie sur ses véhicules. Ajoutez à cela les différentes motorisations, les équipements et les options et les possibilités sont innombrables ! Cette ultra-personnalisation est une expérience autour de l’acte d’achat. Plus le client s’implique dans la conception de son produit, plus il y sera attaché. Conçu sur mesure et à la demande, le produit est plus confortable, valorisant et unique aux yeux de son possesseur. Autant d’émotions positives que les entreprises doivent favoriser pour renforcer les liens qui les unissent à leurs clients.

Transformer sa manière de produire

En matière de transformation digitale, la capacité d’une organisation à accélérer est un enjeu majeur de succès. Les entreprises les plus disruptives sont capables de concurrencer les leaders établis du secteur, de perturber leur marché et de croître durablement grâce à leur agilité native. Elles développent des cycles courts de décision. Pour elles, créer une nouvelle fonctionnalité est une décision facile à prendre et rapide à exécuter, ce qui a pour effet d’accélérer le time-to-market. En miroir, elles savent pivoter sans tergiverser lorsque l’expérimentation d’une idée n’est pas un succès. L’intérêt de cette approche est de percevoir en quelques mois un revenu, contre plusieurs années auparavant.

C’est le cas des plateformes technologiques comme BlaBlaCar. Toutes se sont lancées sur le marché par un Minimum Viable Product (MVP) et déploient des fonctionnalités ou en suppriment tous les trimestres. Un enseignement à méditer pour les entreprises en cours de transformation.

Les technologies, un catalyseur et un accélérateur

Les nouvelles technologies sont le dénominateur commun de la transformation digitale. Elles favorisent la croissance de l’entreprise en la connectant à ses clients. Elles créent une émulation entre les collaborateurs et les partenaires de l’entreprise. Avec des systèmes de plus en plus connectés et ouverts, beaucoup de données sont disponibles pour développer des produits et des services distinctifs. C’est le cas de Carrefour, qui collabore avec la start-up Tilkal pour créer des blockchains afin de tracer l’origine de ses produits dans un registre infalsifiable. Le consommateur final peut connaître en quelques secondes le parcours du produit et renforce ainsi sa confiance envers la marque distributeur. La coopération au-delà des frontières de l'entreprise devient vitale sur toute la chaîne de valeur. C’est tout l’écosystème de l’entreprise qui est tiré par le haut grâce à sa transformation digitale.